mercredi 11 juillet 2012

JOUR 25 : NOGARO - AIRE SUR L'ADOUR

25km - Temps de marche : 6h



"I've been through the desert on a horse with no name,
It felt good to be out of the rain,
In the desert you can remember your name,
Because there ain't no one for to give you no pain..."
America - "Horse with no name"

"Tracks" - GoPro2
"UN CHEMIN"
Le chemin me prend. Plus les kilomètres défilent et plus je me sens partie de lui, plus je le sens partie de moi. Une étrange relation s'est établie entre nous depuis mon départ. Nous étions des étrangers l'un pour l'autre, et comme dans toute relation il faut apprendre à se connaitre. Observer et écouter, en regard de mon égoïsme naturel d'enfant unique cette partie n'est jamais gagnée d'avance. Car tout est possible au départ du chemin. On peut le prendre en touriste, en randonneur, se fermer ou s'ouvir aux us et coutumes, préférer l'hotel au gite, dormir à droite ou à gauche, marcher plus ou moins... 
On anticipe cette aventure selon ce qu'on penses y trouver et ce qu'on connait de nous-même. Le chemin ne remet rien de tout cela en cause. Il n'efface rien, n'exige rien, nous sommes le centre de son attention et nous pouvons aborder ses pentes selon notre tempérament. Plaisirs ou frustrations, on peut y trouver en effet ce qu'on cherche et rester ce qu'on était hier. 
Alors oui on peut prendre une carte et le suivre. Mais ce qu'EST le chemin ne se révèle que si on sait le lire. Et ce qu'on EST sur le chemin ne se révèle que si l'on accepte de se lire soit-même. 

"One ladder up" - GoPro2

Je suis parti en pèlerin, mais il ne suffit pas de le dire pour l'être. Je suis parti avec la certitude de faire la bonne chose, mais j'étais un novice. Les clefs du chemin ne se trouvent pas dans les certitudes mais dans la détermination. Les certitudes n'offrent aucun horizon, aucune imprévisibilité, alors que la détermination nous pousse à réaliser des choses dont l'issue est justement incertaine. Je m'en rends compte maintenant, je n'étais pas "certain" de mon choix, mais "déterminé" à le vivre. C'est pour ça que je suis là.







Mon apprentissage du chemin est passé par l'accomodation sociale aux autres, par la douleur des membres, la maladie, l'effort, le confort spartiate du sac, la liberté du minimum, le poid du maximum. La difficulté du relief, les moments de doute, de fatigue, de plaisir, tout dès le premier jour nous conditionne au lendemain et à la longue route qui nous attend. Chaque jour est une leçon, chacune nous éduque et nous prépare pour qu'on foule cette route d'un pied toujours plus sûr et déterminé le lendemain. 
  
Depuis je pose le pied là où des milliers, des millions d'autres l'ont posé avant moi. Chacun de nos pas est une victoire, une pénitence, un espoir et une conquête. Il plane ici un parfum d'histoire et de volonté palpable par l'addition de toutes ces briques d'humanité. Quand la route s'ouvre, quand je sors d'un virage pour entrer dans un autre, je ressens le parallèle entre mon déplacement cardinal et mon déplacement cérébral. Ces montées, ces descentes, chaque jours différentes, me font réaliser que ma mission se complète à chaque pas. Pour chaque mètre franchi je découvre toujours plus du chemin et de moi-même. Je ne regardes plus en arrière car les choix de routes prennent une place unique dans ce tracé qui me mène à la ville sainte, à ma ville sainte. 
Voyez-y ce que vous voulez : foi, philosophie ou analyse. Il n'y a pas de différence, tant le croyant et le cartésien peuvent enfin ne faire qu'un sur le "Camino". Le chemin de Compostelle est une carte vers la part de sacré en nous, qui se dévoile lorsque on accepte avec humilité d'en concevoir l'existence. 

"Jeezus" - GoPro2


J'en suis presque à la moitié du tracé, ma route se déroule devant moi, mon apprentissage n'est pas fini. Chaque matin l'appel est plus fort, l'envie d'avancer est palpable dans les muscles, dans la tête et dans le coeur. Alors je me lève tôt, je mange de quoi tenir au moins 20km et je lève mon sac. Je pars à nouveau mais je ne marche plus sur le chemin, je marche dans le chemin...

3 commentaires:

  1. je me pose quand même des questions :
    - à part toi-même , ce qui est déjà une belle découverte, fais-tu d'autres rencontres ? tu n'en parles pas.
    - lis-tu les commentaires que nous faisons . si oui, tu n'y réagis pas . par manque d'intérêt ?

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  2. Si si je suis très sensible aux commentaires justement et j'ai répondu, regardes...

    Je parles de mes ressentis et de mon introspection sur cette expérience, j'y suis avant tout en solo, voilà tout.

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  3. sorry pour mes doutes, il semble que quelquechose a changé dans la configuration que l'ai de ton blog car maintenant, je peux lire tes réponses.
    J'ai comme tout un chacun, perdu des êtres proches et il m'a fallu longtemps pour l'accepter. J'ai aussi cotoyé la mort de très prêt et depuis, je l'ai un peu apprivoisée. Avant, elle me faisait très peur, maintenant , je l'envisage plus comme une rencontre programmée (par qui, par quoi ???).
    J'aime beaucoup l'image de la vie comme un train dans lequel montent et descendent des passagers que tu rencontres -ou pas.
    Ultreia

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